Les exigences liées aux nouveaux systèmes énergétiques évoluant rapidement, les services publics doivent investir dans la modernisation du réseau pour assurer un approvisionnement énergétique sûr, fiable et hautement résilient, répondre aux attentes des clients et tirer une plus grande valeur de leurs actifs. La voix de nos clients CGI 2022 révèle que la carboneutralité et l’adoption des ressources énergétiques distribuées représentent l’une des principales tendances sectorielles, tandis que la modernisation des TI pour réduire les coûts et accroître l’agilité est un objectif prioritaire pour les dirigeants du secteur de l’énergie et des services publics.

Dans cette séance de questions, Vincent Dufresne, expert en énergie de CGI, nous expliquera ce qu’implique la modernisation du réseau et quels en sont ses moteurs et ses défis. Il nous présentera également les avantages des systèmes de gestion des ressources énergétiques distribuées (DERMS).

Qu’entend-on par « moderniser le réseau »?

Moderniser le réseau signifie mettre à niveau à la fois le matériel et les logiciels qui composent le réseau électrique. L’infrastructure actuelle continue de vieillir et des mises à niveau sont nécessaires pour relever les nouveaux défis toujours plus nombreux. Ces défis consistent notamment à faire face à l’adoption croissante des sources renouvelables variables (par exemple, les parcs éoliens et photovoltaïques) sur les marchés de vente d’électricité en gros, et à l’électrification du transport, de la construction et des processus industriels. Ils consistent également à gérer la production décentralisée et les dispositifs de stockage non reliés au compteur dont se sont dotés les consommateurs (tels que les panneaux photovoltaïques installés sur les toits des bâtiments, les générateurs de secours, les systèmes de stockage dans des batteries et les systèmes de production combinée de chaleur et d’électricité).

Parlons d’abord de la modernisation du matériel physique. Cela implique le remplacement et l’ajout de câbles de transport et de distribution ainsi que de postes de transformation, l’ajout de centrales de production et l’intégration de nouveaux actifs de production décentralisée que les consommateurs choisissent d’ajouter à leurs bâtiments.

Ensuite, il y a la modernisation des logiciels. Cette modernisation est nécessaire pour suivre le rythme de l’innovation et des attentes croissantes des clients ainsi que pour optimiser l’efficacité opérationnelle. Face à ces nombreux nouveaux défis, il faudra se doter de systèmes plus récents pour collecter, stocker, gérer et exploiter des données beaucoup plus nombreuses qu’auparavant, surveiller le réseau de manière beaucoup plus granulaire, et ce, jusqu’à sa périphérie (par exemple, les transformateurs de rue et les compteurs). Il faudra veiller également à mieux anticiper les événements futurs du réseau, non seulement à court, à moyen et à long terme, mais aussi en cas de production décentralisée.

Par ailleurs, pour faire face à la production variable, au chargement/déchargement des batteries, au chargement des véhicules électriques et à la nouvelle demande hivernale provenant des pompes à chaleur électriques, nous devrons être en mesure de surveiller un nombre toujours plus grand de dispositifs distants, dont beaucoup ne sont pas reliés aux compteurs, et d’envoyer des signaux de contrôle plus rapidement et plus fréquemment.

La gamme d’équipements pouvant recevoir des signaux de contrôle ne cesse de croître. Les appareils de production décentralisée gagnent certainement à être contrôlés. Dans un même temps, les services publics vont également vouloir surveiller et contrôler d’autres appareils tels que les thermostats et les chauffe-eau intelligents, les systèmes avancés d’automatisation des bâtiments, les bornes de recharge de véhicules électriques en réseau et les dispositifs de contrôle des pompes de piscine.

Les signaux de contrôle se présentaient auparavant que sous la forme d’un simple signal binaire (Marche/Arrêt), considéré alors comme un dispositif de gestion de la demande, des ressources énergétiques distribuées essentielles qui permettront d’équilibrer le réseau. La gestion de la demande va progressivement se transformer en une gestion flexible et plus élaborée de la charge, sous la forme de signaux de prix dynamiques localisés ou de signaux de ralentissement artificiel du trafic, qui seront moins intrusifs et mieux tolérés par les clients. Tous ces éléments accélèrent la nécessité de se doter de logiciels plus nombreux et plus performants.

Bien entendu, ces mises à niveau auront une incidence sur l’aspect humain. Elles entraîneront une modification des processus d’affaires associés et exigeront une nouvelle formation du personnel. En effet, 57 % des cadres du secteur de l’énergie et des services publics interrogés dans le cadre de nos entrevues La voix de nos clients déclarent que la culture et la gestion du changement constituent une contrainte importante dans la réalisation des priorités d’entreprise, tandis que 88 % déclarent qu’il est particulièrement difficile de trouver les talents informatiques dont ils ont tant besoin.

Q. : Quels sont les changements attendus du système énergétique dans le cadre de la transition énergétique?

Tout d’abord, la demande en électricité va connaître une forte croissance. Ensuite, cette demande, qu’elle soit actuelle ou nouvelle, sera probablement satisfaite par de nouvelles sources de production renouvelables variables, principalement des parcs solaires et des parcs éoliens, qui sont aujourd’hui des solutions concurrentielles et abordables. Ces sources nécessiteront davantage de sites de production, car elles sont en général déployées à plus petite échelle que les centrales au gaz naturel, au charbon, nucléaires et que les grandes centrales hydroélectriques. Elles doivent également être situées là où les ressources se trouvent, lesquelles sont disséminées sur de grandes distances. Cela signifie que l’équilibre entre l’offre et la demande d’électricité va être plus difficile à atteindre. Les centrales de production et les technologies consommatrices d’électricité devront être contrôlées de manière plus granulaire, selon le lieu de la demande et des sites de production ainsi que selon le moment où l’électricité est négociée.

Q. : Quels sont les principaux moteurs de la modernisation du réseau et du passage à la transformation numérique dans les services publics?

Avec la transition énergétique, une pression accrue s’exerce pour moderniser le réseau. Dans nos entrevues La voix de nos clients, 77 % des dirigeants du secteur de l’énergie et des services publics considèrent que le développement durable est un facteur important pour créer de la valeur. Jusqu’à présent, les services publics d’électricité, les régulateurs et les gestionnaires de réseaux de transport avaient trouvé un équilibre entre le prix des services énergétiques et leur accessibilité et la fiabilité de l’approvisionnement en électricité. Aujourd’hui, l’atténuation des changements climatiques est devenue un troisième aspect, tout aussi important, à prendre en compte.

La nécessité de moderniser périodiquement le réseau a toujours existé, les technologies devenant obsolètes et les infrastructures vieillissantes. À présent, les changements climatiques accroissent l’importance de la modernisation, et la rendent encore plus délicate, car l’objectif n’est pas seulement de décarboner le réseau existant, mais également de décarboner les futures demandes en électricité.

Ce dernier point n’est pas anodin. La croissance annuelle de la demande d’électricité prévue au cours des 30 prochaines années est sans précédent, non seulement parce que les populations et les économies vont croître, mais également parce que nous devrons électrifier une grande partie des énergies d’utilisation finale qui sont aujourd’hui alimentées par le gaz naturel, les produits pétroliers et le charbon. Actuellement, l’électricité ne dessert que 15 à 25 % des utilisations finales d’énergie. Il s’agit d’une vision quelque peu simpliste, car les électrotechnologies sont beaucoup plus efficaces que les technologies fossiles. Néanmoins, elle illustre l’ampleur du défi. Une fois l’efficacité prise en compte, les études sur la décarbonation prévoient que les capacités de production, de transport et de distribution d’électricité pourraient doubler ou tripler d’ici 2050.

Comme je l’ai mentionné, la modernisation du réseau implique la mise à niveau du matériel et des logiciels. Cela dit, la modernisation des logiciels peut potentiellement réduire le coût du matériel et permettre ainsi de contrôler les prix et de maîtriser l’accessibilité et la fiabilité. En outre, la modernisation des logiciels permettra aux services publics de mieux évaluer le montant de leurs investissements dans les câbles, les centrales de production, les transformateurs, etc. Cela les empêchera de trop construire ou de construire trop hâtivement et, ainsi, de gaspiller des ressources et d’exercer une trop forte pression à la hausse sur les prix de l’énergie.

Q. : Comment le changement climatique catalyse-t-il cette évolution?

Le changement climatique déclenche deux phénomènes : 1) une accélération de l’électrification des utilisations finales des combustibles fossiles du côté de la demande et, 2) l’adoption de nouvelles énergies renouvelables variables, sans émissions de gaz à effet de serre, du côté de l’offre. Dans les deux cas, il conviendra de continuer de maîtriser l’accessibilité à l’énergie et la fiabilité de l’approvisionnement. Les énergies renouvelables variables donnent lieu à de vastes débats et sont souvent perçues comme étant à la fois un élément perturbateur et la solution. Cependant, je pense que l’électrification des secteurs du transport, de la construction et de l’industrie sera encore plus dérangeante et nécessitera, à son tour, encore plus d’énergies renouvelables variables.

Q. : Quels types d’investissements seront réalisés par les services publics en matière de modernisation numérique liée à la transition énergétique?

Tout d’abord, les services publics devront acquérir un système de gestion des ressources énergétiques distribuées (DERMS) à l’échelle de l’entreprise, un système de référence en quelque sorte. Il s’agira d’un logiciel, développé à l’échelle de l’entreprise, qui orchestrera les données, l’état du réseau, les capacités d’analyse prédictive et les fonctions de surveillance et de contrôle des appareils périphériques.

Le système DERMS sera également capable d’interagir avec d’autres systèmes similaires, développés à plus petite échelle, et utilisés par les agents responsables de la gestion de la demande et les sous-traitants chargés de la mise en œuvre de l’efficacité énergétique. Les services publics ont besoin de ces intermédiaires tiers pour renforcer leur capacité à mobiliser les clients et à les inscrire à des programmes de gestion de la demande et de ressources énergétiques distribuées. En général, ces intermédiaires tiers s’organisent autour de leur propre DERMS, que nous pouvons appeler des « DERMS allégés » pour contrôler le parc de ressources énergétiques distribuées qu’ils ont mis en place.

Un service public peut faire affaire avec plus d’un agent pour bénéficier de l’effet de concurrence. Le système de gestion des ressources énergétiques distribuées de l’entreprise constitue le noyau dont les services publics auront besoin pour appréhender l’ensemble de cet écosystème complexe.

Revenons maintenant à l’objectif initial du déploiement d’une solution de gestion des ressources énergétiques distribuées, qui consiste à évaluer au plus juste le montant des investissements consacrés au matériel du réseau en gérant son engorgement et en s’assurant que toute nouvelle mise à niveau du matériel est pleinement exploitée aussitôt l’investissement réalisé. Le système de gestion des ressources énergétiques distribuées de l’entreprise interagira avec divers DERMS allégés pour surveiller et contrôler les dispositifs distants grâce à l’Internet des objets et à d’autres protocoles de communication. Il extraira également des données en temps réel sur la consommation d’électricité des bâtiments depuis l’infrastructure de mesurage avancé, les données de typologie du réseau, les prévisions météorologiques, l’historique d’utilisation ou l’état de défectuosité de l’équipement du réseau. De plus, le système de gestion des ressources énergétiques distribuées de l’entreprise interagira également avec les systèmes de contrôle des réseaux de gros existants afin de maximiser les avantages des ressources énergétiques distribuées, en amont du point de connexion de transport et de distribution et tout au long de la chaîne de valeur de l’électricité.

Par ailleurs, à un niveau supérieur, le système avancé de gestion de la distribution (ADM) fera le lien entre le système de gestion des ressources énergétiques distribuées et les systèmes de gestion des pannes, de gestion des équipes mobiles, de facturation et de traitement des commandes. Le système avancé de gestion de la distribution reliera les systèmes traditionnels de l’entreprise les plus pertinents. Les services publics mettent à jour et modernisent ces systèmes, car ils seront utilisés non seulement pour activer l’ADM et le DERMS de l’entreprise, mais aussi pour s’adapter à la nouvelle réalité de la transition énergétique.

Enfin, les services publics travaillent sur de nouvelles solutions d’engagement numérique pour améliorer l’expérience client. Il s’agit notamment de systèmes et de plateformes de gestion de la relation client, d’offres innovantes en matière d’efficacité énergétique, d’électrification et de gestion de la demande, de marketing numérique et même de places de marché numériques pour mettre en relation les clients et les fournisseurs d’équipements pertinents (prestataires de systèmes photovoltaïques, chauffagistes, installateurs de système de ventilation et de climatisation et concessionnaires de véhicules électriques).

Les services publics se préparent ainsi à la transformation de leur modèle d’affaires et à leur nouveau rôle éventuel d’opérateurs transactionnels de plateformes d’énergie, au lieu d’opérer comme de simples fournisseurs de services. Dans une large mesure, ils s’allient aux revendeurs de ressources énergétiques distribuées, mais beaucoup d’entre eux se préparent également à gérer leurs propres opérations dans ce domaine, car cela pourrait représenter une nouvelle occasion d’affaires.

En fin de compte, les systèmes de gestion des ressources énergétiques distribuées ne sont intéressants que s’ils contrôlent un grand parc de ressources énergétiques distribuées, ce qui ne sera possible que si un grand nombre de clients est prêt à participer à ces programmes et à laisser les services publics contrôler leurs appareils. Il s’agit là de défis délicats qui exigent des expériences client attrayantes afin de favoriser la fidélisation des clients aux programmes de ressources énergétiques distribuées. Apprenez-en davantage sur les services et les solutions de CGI dans le domaine de l’énergie et des services publics, y compris sur les systèmes de gestion des ressources énergétiques distribuées d’entreprise.

Appel à l’action : Système de gestion des ressources énergétiques distribuées (DERMS).