Les services bancaires ouverts sont pressentis pour offrir un nouvel écosystème révolutionnaire qui comprend l’échange instantané et sécurisé des données des clients entre les institutions financières et les tiers accrédités comme les entreprises de technologies financières. Les services bancaires ouverts représentent un paradigme qui changera la donne et qui améliorera grandement l’expérience utilisateur et les résultats financiers en offrant, dans notre marché actuel centré sur le client, un univers moderne et nouvellement connecté aux systèmes financiers.
L’avenir des services bancaires ouverts était au cœur des discussions du Sommet virtuel de Paiements Canada, qui comprenait une séance intitulée Open Banking in Canada – Read is NOT Enough et qui a suscité une réflexion. David Hooper, vice-président des services bancaires ouverts et des services-conseils en paiements de CGI, Mahima Poddar, vice-présidente principale et dirigeante des services bancaires personnels à Equitable Bank et Marc Milewski, cofondateur et chef de la direction de Zῡm Rails Payment Gateway, ont participé à la séance et ont partagé des idées sur ce que l’avenir nous réserve.
Au Canada, nous continuons d’assister à une concentration relativement étroite sur les exigences technologiques des services bancaires ouverts, notamment sur les interfaces de programmation d’applications (API) et l’agrégation de données, alors que l’accent requis sur les services novateurs qui offrent une nouvelle valeur fait défaut.
Le 22 mars 2022, le gouvernement fédéral a annoncé la prochaine étape dans l’établissement du système de services bancaires ouverts au pays avec la nomination d’Abraham Tachjian à titre de responsable du système bancaire ouvert. M. Tachjian devra trouver une solution « faite au Canada », en utilisant les commentaires du secteur, des autorités de réglementation et des autres parties intéressées (fournisseurs de technologies financières) pour concevoir et mettre en place les piliers clés du système de services bancaires ouverts du Canada, y compris les normes communes et un cadre de responsabilité et d’accréditation pour les participants.
Il s’agit d’une bonne nouvelle si l’on considère que le Canada est un retardataire en matière de services bancaires ouverts par rapport aux pays d’Europe et d’ailleurs. Malheureusement, nous avons choisi un chemin qui limitera notre capacité à apporter de la vraie valeur aux consommateurs et aux entreprises.
Les pays qui font le saut vers les services bancaires ouverts créent de la valeur pour les clients en allant au-delà d’une approche de « lecture seule » qui permet la simple agrégation et analyse des données, mais ne permet pas de prendre des mesures concrètes. La réelle valeur exige la capacité de fournir des services en contact direct avec le client et qui permettent de lui offrir des conseils et des recommandations; une approche « d’écriture » qui fournit des informations, mais qui permet aussi au destinataire d’agir ou de lancer une activité financière, qu’il s’agisse de transférer des fonds, d’effectuer un paiement ou de souscrire à un nouveau produit ou service.
La capacité d’accéder aux comptes et aux données qu’ils contiennent permettrait une analyse et une agrégation des données. Être capable d’agir signifie permettre l’initiation de paiements et une certaine mobilité des comptes ou des données, ce qui comporte généralement la possibilité d’ouvrir et de fermer des comptes ou de passer d’un service à un autre.
Source : © 2022 CGI
Le Canada tire de l’arrière alors que les banques mondiales donnent le ton
Les banques européennes ont déjà commencé à transformer leurs services. Elles ont lancé des interfaces de programmation d’applications (API) ouvertes et ont intégré les organisations bancaires traditionnelles aux entreprises de technologies financières novatrices pour livrer des services interactifs et des offres personnalisées que les clients veulent. Celles-ci comprennent notamment les paiements instantanés en ligne, la gestion des flux de trésorerie, les conseils financiers, la comparaison des prix des produits entre les concurrents bancaires, etc.
« Les banques canadiennes doivent aller au-delà de leur accès en “lecture seule”, explique Mahima Poddar, vice-présidente principale des services bancaires personnels à Equitable Bank. Les grandes banques doivent réaliser d’énormes investissements technologiques pour jeter les bases des services bancaires ouverts, note Mme Poddar. Même s’il y a des avantages à l’accès en lecture seule, il nous mène seulement à mi-chemin. L’initiation des paiements et la mobilité des données sont des aspects importants dans l’équation des services bancaires ouverts. »
Selon Marc Milewski, cofondateur et chef de la direction de Zῡm Rails, une partie du problème pourrait être l’écart significatif existant entre la théorie des services bancaires ouverts et le besoin de réels cas d’utilisation.
« Personne n’explique clairement les cas d’utilisation, par exemple la gestion du temps et l’efficacité sur le marché, explique Milewski. Tout le monde devrait pouvoir relier leur compte bancaire, par exemple, à l’application QuickBooks qui peut automatiquement assimiler les informations bancaires. C’est un excellent cas d’utilisation, mais il est rarement abordé avec les services bancaires ouverts. »
Pour illustrer son propos, M. Milewski note que le Brésil a déployé simultanément les paiements instantanés et les services bancaires ouverts, malgré une population dix fois supérieure à celle du Canada et un manque relatif d’infrastructures modernes. Le système du Brésil comprend des capacités de codes QR pour améliorer la vitesse, la sécurité et la commodité du système.
« Ils ont réussi parfaitement, explique-t-il, et cela montre le besoin de cas d’utilisation clairs et pas seulement une grande vision vague des services bancaires ouverts ou de ce qu’ils pourraient être. ».
Les banques doivent ajouter de la valeur pour satisfaire les besoins des clients
Le besoin pour les services bancaires ouverts et sa capacité à apporter une nouvelle valeur dans le marché actuel sont indéniables, notamment pour les petites et moyennes entreprises qui cherchent à gérer leurs finances et à stimuler leur croissance dans un contexte de volatilité économique.
« Les petites entreprises ont lancé un appel à l’aide pour gérer leurs activités. Le besoin d’aide avec la réconciliation des paiements, par exemple, est énorme, explique David Hooper, vice-président des services bancaires ouverts et des services-conseils en paiements de CGI. Au lieu de simplement montrer un graphique fantaisiste qui indique que vous avez dépensé trop d’argent ce mois-ci, nous devrions plutôt dire : "Nous pouvons vous aider à gérer les problèmes de trésorerie en vous apportant des fonds supplémentaires pour traverser une période difficile." La clientèle apprécierait de tels services. »
« Il s’agit d’aider les entreprises et les consommateurs à gérer leurs finances, leur trésorerie et leurs cartes de crédit de manière plus efficace, ajoute Hooper. Dites au client comment mettre rapidement l’argent qu’il a économisé ce mois-ci dans un CELI ou dans son paiement de prêt hypothécaire; c’est ça de la vraie valeur. Améliorer les affaires et la vie financière des gens, c’est là la cible du marché de la valeur. »
Même si le Canada a maintenu une approche de la « sécurité d’abord » en ce qui concerne le potentiel du partage des données des services bancaires ouverts afin de réduire les risques, cela est sur le point de changer compte tenu des recommandations finales du comité consultatif sur le système bancaire ouvert. David Hooper salue la grande portée du cadre proposé dans le rapport d’avril 2021 du comité.
« J’apprécie le fait que notre champ d’action soit plus large que celui de certains autres pays, note-t-il. La portée couvre tout ce qui est accessible par les services bancaires en ligne, notamment les comptes d’épargne et les comptes chèques, les prêts hypothécaires, les prêts, les cartes de crédit, les régimes d’épargne-retraite et les CELI. Nous évoluerons pour offrir des comparaisons de produits et de prix entre les institutions financières. Par exemple, pour savoir qui offre les taux d’intérêt ou les frais de cartes de crédit les plus bas. »
« En cours de route, souligne-t-il, les grandes banques ont un rôle important à jouer en faisant avancer les choses; en faisant progresser l’innovation indispensable à un rythme plus rapide et dans une direction qui inclut davantage les éléments qui apportent de la valeur. »
Les consommateurs et les entreprises ont un rôle à jouer pour stimuler l’innovation
« En plus d’être à l’origine de changements proactifs, les banques peuvent encourager les consommateurs et les entreprises à faire entendre leur voix et à jouer un rôle clé dans l’accélération du processus des services bancaires ouverts », ajoute Mme Poddar, de Equitable Bank, notant le succès des autres pays.
« Les autorités au Royaume-Uni ont un budget consacré à la sensibilisation des consommateurs sur les avantages et les cas d’utilisation des services bancaires ouverts. Nous avons besoin de quelque chose de semblable au Canada pour lancer un mouvement de sensibilisation et de demande, explique-t-elle. Il est de notre responsabilité, dans le secteur, de faire tout notre possible pour sensibiliser et défendre les consommateurs, car nous avons encore beaucoup de chemin à parcourir. »
Une approche proactive et axée sur le marché de la part des banques, ainsi qu’une demande accrue de la part des consommateurs canadiens, pourraient s’avérer déterminantes étant donné que même si les services bancaires ouverts figurent sur la liste de tâches d’Ottawa, ils sont loin d’être une priorité dans le contexte des préoccupations économiques actuelles, notamment l’inflation, la hausse des taux d’intérêt et la menace imminente d’une récession.
« Toutes politiques ou nouvelles législations prennent du temps à être appliquées, mais nous ne pouvons pas attendre. Allons de l’avant avec une vision, suggère M. Hooper, de CGI. Plus tard, les autorités pourraient nous dire “non, restez dans ces limites ou utilisez ces garde-corps”. Si nous attendons de nous faire dire ce que nous pouvons faire, nous ne réussirons jamais. Nous devons aller de l’avant et commencer à repousser les limites. Cela comprend une vision et un cadre clair pour voir à quoi ressemble l’avenir des services bancaires ouverts. »
« Les succès mondiaux nous fourniront d’importantes perspectives », ajoute Marc Milewski, chef de la direction de Zῡm Rails, qui note que la réussite du Brésil est un excellent exemple de ce qui peut être fait pour donner vie à une vision des services bancaires ouverts. « Je l’ai vu à l’œuvre et, en ce qui me concerne, il s’agit de la norme d’excellence dont nous pouvons nous inspirer. »
Si la mise en place d’un cadre de services bancaires ouverts avec une gouvernance normalisée, un partage sécurisé des données et une authentification fiable constitue la prochaine étape critique pour l’avenir du Canada, les experts s’accordent pour dire qu’il n’y a tout simplement pas de temps à perdre.
« Nous avons besoin d’un cadre cohérent et clair pour les services bancaires ouverts et cela demande des mesures immédiates et décisives, avertit M. Milewski. En ce moment, avec l’inflation, la volatilité économique et le réel risque de récession, je crois que le Canada, en tant qu’économie, souffrira si les services bancaires ouverts ne sont pas abordés dans les six prochains mois. »
Si vous souhaitez discuter des sujets abordés dans cet article, des services bancaires ouverts en général ou du travail de CGI dans ce domaine partout au Canada, communiquez avec David Hooper - David.hooper@cgi.com..