Dans le récent épisode de notre balado Parlons transition énergétique, Andrea Grad, de CGI Unicorn Academy, s’entretient avec Karl Schmalz et Martin Tauer, deux experts en transition énergétique. L’Europe, et l’Allemagne en particulier, sont au cœur des discussions sur les objectifs de carboneutralité, dans lesquels sont évoqués les défis liés à la production de rapports ainsi que le rôle de l’innovation et des données dans l’accélération du progrès.
Les approches varient selon les régions et les infrastructures
Si l’objectif mondial zéro émission de gaz à effet de serre est fixé à 2050, certains pays affichent des échéances plus ambitieuses. L’Allemagne, par exemple, s’est fixé 2045 comme objectif, et plusieurs régions et villes proposent des cibles encore plus ambitieuses.
L’énergie durable est déjà un sujet d’actualité. Cependant, toutes les régions ou organisations ne disposent pas des mêmes outils ou du même environnement pour effectuer une transition aussi rapide ou transparente que d’autres. Comme l’explique Martin Tauer, cela contribue à des différences entre les objectifs, les approches et les facteurs de réussite.
La ville de Brême, par exemple, a pour objectif de parvenir à une carboneutralité d’ici 2038, soit sept ans plus tôt que l’objectif national allemand. Elle dispose d’infrastructures adaptées au changement climatique telles que des ports maritimes ainsi que des terminaux de logistique, de manutention et de croisière. La ville est un centre industriel de premier plan qui mise sur son industrie métallurgique de pointe pour opérer sa transition énergétique.
Plus spécifiquement, elle prévoit de produire de l’acier vert en intégrant l’hydrogène au processus de production. Comme Martin Tauer l’explique : « il s’agit d’un sujet très urgent et d’un projet hautement prioritaire, car l’échec de ce seul objectif compromettrait entièrement les ambitions de neutralité climatique de la ville d’ici 2038. »
D’ailleurs, Karl Schmalz reconnaît que l’hydrogène vert est aujourd’hui essentiel pour atteindre les objectifs zéro carbone. Toutefois, l’approche et la politique sont deux éléments indispensables à la réussite de cette transition. Ainsi, l’intégration et l’adaptation de la production photovoltaïque, selon lui, fonctionnent bien dans le cadre de la transition « active » en Allemagne. « Personnellement, j’y vois un bon moyen de stabiliser le réseau, grâce à un grand nombre d’installations dans les foyers; tandis que l’énergie éolienne servira à stabiliser les plus gros consommateurs de l’industrie », explique-t-il.
Des exigences croissantes en matière de production de rapports ESG pour justifier les actions entreprises
De plus en plus, les organisations doivent être en mesure de prouver qu’elles œuvrent à la réalisation de leurs objectifs de transition énergétique. C’est là que les rapports sur les critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) deviennent essentiels.
Martin Tauer fait remarquer que les organisations doivent s’assurer que leur dispositif de production de rapports ESG fonctionne à la fois d’un point de vue humain et technique. Cela concerne les petites et moyennes entreprises, qui représentent une force économique importante en Allemagne.
« Bien qu’aujourd’hui, seules quelques entreprises sont tenues et contraintes de présenter ce rapport ESG, dans quelques années seulement (d’ici 2038), près de 100 % des petites et moyennes entreprises allemandes seront obligées de fournir ce type de rapport », ajoute-t-il.
Outre la planification des délais et des échéances pour atteindre la carboneutralité, les organisations ont également besoin de définir précisément les étapes intermédiaires et de mettre en place des barrières de qualité. La difficulté réside dans le fait que beaucoup d’entre elles ne sont pas encore préparées ou ne disposent pas des connaissances requises pour publier ces rapports ESG.
L’intérêt d’une plateforme commune d’échange de données
Martin Tauer estime que disposer d’une plateforme commune d’échange de données pourrait aider les organisations à préparer leurs rapports ESG.
Il explique que le champ d’application 11 se concentre sur les émissions directes, sous le contrôle d’une organisation, tandis que le champ d’application 2 concerne les émissions indirectes provenant de l’énergie achetée (c’est-à-dire la consommation d’énergie). Dans le cas du travail à distance, la transmission de données pour le champ d’application 2 pose des problèmes de protection des données personnelles.
Les implications sont encore plus profondes pour la présentation du champ d’application 3, ajoute-t-il. En effet, il nécessite des vérifications dans l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement d’une organisation afin de répondre aux questions suivantes : « Comment le client utilise-t-il votre produit à la fin de son cycle de vie? Est-il correctement éliminé et combien d’unités de votre produit seront ou ne seront pas recyclées? »
Du point de vue de l’aide à la décision, Martin Tauer estime « qu’en ce qui concerne l’Union européenne, l’existence de formats de données interchangeables et de réglementations normalisées pour des objets tels que les compteurs intelligents ou les petits générateurs d’électricité » permettrait d’optimiser la gestion du réseau et contribuerait à sensibiliser les citoyens à leur consommation d’énergie.
Il ajoute que de nouvelles technologies émergent également et permettent d’apporter des innovations de marché aux clients et aux consommateurs. Par exemple, les prix dynamiques tout au long de la journée n’ont plus de sens lorsqu’il s’agit d’essayer d’aligner la consommation sur le marché. « Vous découvrez de nouvelles approches en intégrant la domotique et d’autres systèmes de l’Internet des objets », ce qui permet aux consommateurs d’économiser sur leurs factures d’énergie grâce à leur propre prise de conscience et à des solutions numériques, explique Martin Tauer.
Le pouvoir de l’innovation
Le chemin vers la carboneutralité est propre à chacun, et il en va de même pour les solutions à mettre en œuvre. De l’intelligence artificielle aux plateformes d’échange de données, en passant par les applications qui récompensent les conducteurs les plus économiques d’une flotte, les solutions numériques novatrices accélèrent l’action humaine.
1 Les normes du GHG Protocol pour les champs d'application 1, 2 et 3 fournissent une base comptable permettant aux entreprises de mesurer, de planifier et de suivre les progrès vers les objectifs scientifiques et nets zéro.
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