La stratégie de localisation IT est un enjeu majeur pour les entreprises. Dans un contexte de constante pression financière, il est nécessaire d’avoir les bonnes compétences, au bon endroit, au bon moment et à un coût raisonné tout en veillant à conserver la productivité et la valeur délivrée.
Le tryptique Onshore, Nearshore et Offshore
Historiquement, la stratégie de localisation des départements IT se découpe en trois types d’activités. L’Onshore qui est généralement le centre névralgique des activités stratégiques mais ne permet pas toujours de trouver les profils les plus qualifiés pour les activités opérationnelles. Ensuite, les centres d’activités en Nearshore. Ils permettent de rechercher une ou des compétences spécifiques moins présentes en Onshore tout en capitalisant sur une proximité culturelle et géographique forte avec le business. Il est néanmoins très important d’être à l’écoute des collaborateurs en Nearshore car leur marché local est souvent très dynamique et leurs compétences sont recherchées. Enfin, les centres offshore, généralement localisés dans de grande villes ou de taille moyenne (>200 000 habitants), possédant une forte attractivité du fait de tarifs compétitifs et de l’articulation autour d’un savoir-faire précis. C’est par exemple le cas de Bangalore en Inde où 10% des ingénieurs informatiques indiens y sont employés dans le domaine de l’IT. Ce modèle nécessite néanmoins une forte implication managériale localement afin de partager la culture d’entreprise et de réduire le turn-over.
Le Regionshoring ou la relocalisation « made in France »
Depuis plusieurs années, un nouveau modèle fait son apparition : le regionshoring. Ce modèle consiste à transférer des activités en France hors de la région parisienne (vers des villes comme Nantes ou Bordeaux pour des activités de services, ou Lille pour les activités Industrielles). Les avantages sont nombreux pour les entreprises :
- Se rapprocher des pôles technologiques et universitaires dans l’optique d’être plus attractifs pour les candidats ;
- Mieux répondre aux besoins des collaborateurs en matière de mobilité géographique (ce qui contribue à réduire le turnover) ;
- Ne pas se confronter aux problématiques de distance culturelle (ex : en Inde il inenvisageable de dire non à son supérieur hiérarchique) et de compliance des réglementations ;
- Profiter de coûts immobiliers moins contraignants qu’à Paris.
Avec la crise sanitaire, ce modèle connait un regain de popularité car il permet de concilier deux attentes : la relocalisation des activités en France et la possibilité, pour les salariés, de pouvoir travailler ailleurs qu’en Ile-de-France. En effet, une étude réalisée en 2019 par Cadremploi révélait que 80% des cadres franciliens envisageaient de partir en région. Ce modèle, initié en Amérique du Nord, a amené la création de centres d’activités ayant une forte proximité avec les principaux hub du pays tout en réduisant fortement les coûts (de près de 20%) avec un maintien de la qualité délivrée à l’image de GE aviation, Walmart et Barclays. En France, ce modèle se développe aussi avec la création de hub du côté de Clermont-Ferrand ou d’Amiens.
S’appuyer sur des compétences internes ou sur l’expertise de partenaires locaux
On distingue deux modèles principaux de regionshoring. Le premier consiste pour une entreprise à conserver les activités en interne soit en les délocalisant dans des sites déjà existants en région, soit en effectuant un fort investissement afin de créer un nouveau centre d’activités from scratch. Le second consiste à outsourcer ces activités auprès de fournisseurs déjà présents en région, permettant ainsi de faciliter le transfert des activités et d’en assurer une reprise rapide. La crise sanitaire a mis en exergue la nécessité de se recentrer sur une économie plus locale et a induit de nouvelles priorités chez les salariés. Elle a également démontré qu’il était possible de travailler efficacement à distance. Cette prise de conscience encouragerait la mise en place de hub en régions, permettant ainsi de réduire fortement les coûts.
Néanmoins, pour la majorité des directions des systèmes d’information, la stratégie repose largement sur des centres offshore et nearshore et celle-ci ne devrait pas subir de changements trop brutaux pour le moment. Dans un contexte de crise économique, les entreprises auront plus tendance à s’appuyer sur des plans d’économie et devraient donc avoir une appétence plus forte pour l’offshoring et l’outsourcing permettant des économies plus importantes que les autres modèles. Le nearshore de son côté risque d’être fragilisé, car les gains sont limités. De plus, on constate une augmentation du niveau de vie des pays cibles. Aujourd’hui, la tendance reste celle de la continuité des activités en offshore afin d’assurer une reprise rapide et économe de l’activité (56% de part de marché de l’offshoring mondial pour l’Inde avec +6 points entre 2012 & 2019). Demain, lorsque nous aurons tiré les leçons en matière de télétravail et de mobilité, ce choix sera-t-il toujours aussi pertinent ?