Dans le dernier épisode de notre série Parlons transition énergétique series, Marion Braams, vice-présidente-conseil experte chez CGI discute avec Peter Warren de son point de vue d’experte sur les nouvelles tendances en matière de TI, de réglementation en matière de développement durable et de production de rapports. Plus précisément, leur échange porte sur les différentes initiatives ESG d’une région à l’autre, l’évolution et l’incidence des normes et des certifications prescrites par la loi, ainsi que le rôle des TI vertes et de l’IA visant à optimiser les données et la production de rapports ESG.
De nouvelles lois exigeant la production de rapports ESG favorisent l’équité et la responsabilisation
Les facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) deviennent un véritable atout pour les entreprises, au-delà même des objectifs de développement durable, car ils peuvent avoir une incidence sur la gestion des risques, les attentes des parties prenantes, l’innovation et l’efficacité opérationnelle.
Jusqu’à présent, les entreprises n’étaient pas tenues de déclarer leurs émissions de gaz à effet de serre (GES) ni de les réduire, et donc celles qui investissaient en vue de devenir « plus vertes » devaient assumer des coûts plus élevés que les autres. Toutefois, de nouvelles lois, comme la directive sur l’établissement de rapports de durabilité pour les entreprises (CSRD) en Europe et les normes de l’International Sustainability Standards Board (ISSB) aux États-Unis, rendent la déclaration des GES obligatoire, créant ainsi des règles du jeu plus équitables tout en favorisant une plus grande uniformité et une responsabilisation accrue des différentes industries.
Comme l’explique Marion, sans normes élaborées pour mesurer les émissions de GES, les gens procédaient à leur façon. « On ne peut pas se contenter de deviner la quantité de gaz à effet de serre (GES) que quelque chose contient. Prenons l’exemple d’une bière. Il ne suffit pas de regarder sa bière pour connaître son coût ou sa consommation d’énergie. Tout dépend de la façon dont elle a été fabriquée et de la durée de son entreposage, par exemple. Le calcul de ces paramètres est bien complexe. »
Les entreprises peuvent demander des certifications auprès d’organismes comme EcoVadis ou le Carbon Disclosure Project pour vérifier leur niveau d’émissions de GES. Ces certifications exigent des entreprises qu’elles recourent à des méthodes normalisées afin d’effectuer l’estimation et la déclaration de leurs émissions de GES.
Les approches « Green IT » et « Green By IT » contribuent à intégrer les principes ESG au sein des organisations
« Green IT » et « Green By IT » sont deux approches distinctes pour utiliser la technologie de manière écoresponsable. L’approche «Green IT» vise à s’assurer que l’infrastructure de TI elle-même est plus durable en minimisant l’impact environnemental (en adoptant du matériel écoénergétique, par exemple).
D’autre part, l’approche « Green by IT » accorde la priorité à l’utilisation des TI dans le but de favoriser le développement durable à l’échelle de l’entreprise, par exemple en optimisant les processus d’affaires, en réduisant la consommation de ressources et en favorisant des pratiques plus respectueuses de l’environnement.
Marion souligne trois façons dont les organisations mettent leurs TI au service du développement durable.
La gestion des données
Les TI peuvent vous permettre de recueillir, de stocker, d’extraire des données et de produire des rapports. Un portefeuille de TI bien organisé facilite l’accès et la compréhension de vos données.- L’analyse des tendances et l’optimisation
Les TI peuvent servir à formuler des hypothèses (« que se passerait-il si…») pour modéliser l’incidence des changements apportés à la production, au transport, à la chaîne d’approvisionnement, etc. L’optimisation des processus d’affaires et l’utilisation de jumeaux numériques peuvent également contribuer à réduire le gaspillage et l’inefficacité.
- La cybersécurité
La cybersécurité est un facteur important, car un incident de sécurité pourrait entraîner des pertes et des perturbations importantes, surtout pour une entreprise manufacturière.
En ce qui concerne les enjeux ESG, Peter valorise une perspective d’affaires globale qui tient compte des rôles individuels dans l’ensemble de l’écosystème et cible des résultats précis. « Si vous intégrez les principes ESG (si vous le faites correctement et que vous intégrez les principes de sécurité plutôt que de les ajouter), leur efficacité sera renforcée. Cette approche permet de réduire les coûts, qu’il s’agisse simplement de réduire le temps de traitement informatique ou de diminuer les pertes à la sortie d’un entrepôt. La perspective est différente. Il s’agit donc davantage d’un outil. »
Utiliser l’IA pour amorcer votre démarche ESG
Alors que de nouvelles lois seront bientôt en vigueur, Marion suggère de mettre à profit l’année en cours comme une période d’essai plutôt que d’attendre que les rapports ESG deviennent une exigence. Plus précisément, elle recommande d’aller au-delà des données structurées dans vos systèmes de gestion intégrés ou de gestion de la relation client (CRM) pour les données relatives aux émissions de CO2 et d’utiliser l’IA pour examiner les données non structurées afin de trouver des mentions d’enjeux ESG pertinents. « L’IA peut donc servir à trouver un point de départ à partir de vos publications sur la mobilité, l’utilisation du matériel, l’emplacement des bureaux, l’énergie verte, la réduction d’énergie, etc. »
L’IA permet également d’accélérer votre parcours ESG en analysant ce que font les autres acteurs de votre secteur d’activité. « Vous pourriez non seulement l’utiliser pour vos données, mais aussi vous dire : “Nous sommes dans le même secteur d’activité, et voilà le contenu de leur site Web. Comment décrivent-ils leurs activités?” Cela peut vous aider à distinguer les ambitions réalistes de celles qui ne le sont pas, ce qui peut vous aider à établir stratégiquement des objectifs réalisables pour vos propres objectifs en matière d’ESG.
Ce qui est formidable avec l’IA à laquelle nous recourons actuellement, c’est que les données existent probablement déjà dans divers formats au sein de l’organisation », explique Peter. Il s’agit de libérer les données que vous possédiez déjà et de les rendre pertinentes pour votre cas d’utilisation particulier.
Marion reconnaît qu’il peut être décourageant pour des entreprises d’entamer une démarche ESG dans un premier temps, car elles peuvent ne disposer que de peu de données pertinentes, parfois même aucune. Cette étape fait partie du processus, explique-t-elle. « C’est comme pratiquer un nouveau sport; à la première leçon, vous avez l’impression que vous n’avancerez jamais. Ne soyez pas déçu de ne pas progresser le premier jour. »
Et surtout, l’important est de se lancer. Marion insiste : « Ne passez pas trop de temps à vous demander par où commencer, car au bout du compte, vous devrez trouver toutes les données. Il suffit donc de s’y mettre. Se lancer, c’est vraiment ce qui compte, à mon avis. »