La transition énergétique répond à un impératif mondial, essentiel pour relever les défis posés par le changement climatique et orienter nos sociétés vers des pratiques plus durables. Toutefois, cette transformation se heurte à un obstacle de taille : la pénurie de professionnels techniques qualifiés. Cette pénurie de talents entrave non seulement l’innovation, mais aussi la mise en œuvre des projets cruciaux pour faciliter cette transition. Les secteurs les plus touchés sont ceux qui sont au cœur de la transition énergétique : la construction, l’énergie et les infrastructures.

L’intelligence artificielle (IA) devient un outil essentiel pour remédier aux pénuries de main-d’œuvre dans les secteurs de l’énergie et des services publics. Face aux difficultés que rencontrent les entreprises à recruter de la main-d’œuvre qualifiée, l’IA offre des solutions innovantes pour améliorer la productivité et rationaliser les opérations.

L’impasse : faire face à la pénurie de main-d’œuvre qualifiée dans le secteur de l’énergie

Selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE),le secteur de l’énergie est confronté à une grave pénurie de main-d’œuvre qualifiée, en particulier dans les métiers techniques tels que les électriciens et les professionnels des STIM. Son rapport annuel de 2023 sur l’emploi dans le secteur de l’énergie (2023 World Energy Employment) révèle que le nombre d’emplois dans le secteur de l’énergie a augmenté de 3,5 millions entre 2019 et 2022. Plus de la moitié de cette croissance s’est concentrée dans les domaines de l’énergie solaire, de l’énergie éolienne, des véhicules électriques, des thermopompes et de l’extraction des minéraux critiques. Cependant, le rythme des formations et des certifications des travailleurs qualifiés ne parvient pas à suivre l’augmentation de la demande, aggravant ainsi le déficit de compétences dans le secteur.

En outre, la transition vers la carboneutralité devrait créer 14 millions de nouveaux emplois d’ici à 2030, mais cette croissance s’accompagne d’une perte attendue de 5 millions d’emplois dans le secteur des combustibles fossiles. Les nouveaux postes requièrent souvent des compétences distinctes et se trouvent dans des régions différentes de celles touchées par la disparition des postes liés aux combustibles fossiles. Cela nécessite une attention politique particulière pour gérer ces changements de manière efficace.

L’écart de compétences dans le domaine du numérique en Europe, qui a conduit, près de 4 entreprises sur 5 à déclarer, en 2023, qu’il était généralement difficile de trouver des travailleurs possédant les compétences adéquates, a incité la Commission européenne à lancer un partenariat stratégique pour le développement des compétences.. Par ailleurs, selon le rapport d’avancement sur la compétitivité des technologies énergétiques propres, 25 % des entreprises de l’UE actives dans la fabrication d’équipements électriques ont été confrontées à des pénuries sur le marché du travail.

La pénurie d’ingénieurs en informatique est un problème qui touche de nombreux pays. En Europe, on estime que 18 millions de personnes devront se reconvertir pour que le continent atteigne ses objectifs climatiques. Par ailleurs, plus plus d’un million de travailleurs seront nécessaires dans le secteur de l’énergie solaire, d’ici à 2030, pour atteindre des objectifs plus élevés en matière d’énergies renouvelables. Rien qu’au Royaume-Uni, il faudra recruter 400 000 personnes dans des fonctions nouvelles ou existantes liées à l’énergie pour atteindre les objectifs de carboneutralité d’ici 2050 soit 30 % de plus que l’ensemble de la main-d’œuvre actuelle des secteurs pétrolier et gazier disponible pour occuper ces postes.

Le taux d’emploi des techniciens éoliens aux États-Unis devrait augmenter de 60 % en dix ans tandis que le nombre de techniciens éoliens nécessaires à la construction, à l’installation, à l’exploitation et à l’entretien du parc éolien terrestre et maritime mondial d’ici 2026 est estimé à 568 800 personnes au total.

En outre, l’industrie maritime du Royaume-Uni, qui s’efforce d’atteindre des objectifs ambitieux pour augmenter sa capacité éolienne en mer, a prévenu qu’elle devait attirer et fidéliser 10 000 personnes supplémentaires chaque année, d’ici 2030dont un grand nombre dans le domaine des STIM.

En Allemagne, il y a un besoin immédiat de chefs de projet expérimentés pour les projets à grande échelle, et de nouveaux travailleurs qualifiés supplémentaires sont nécessaires pour suivre le rythme des programmes accélérés de transition énergétique. Outre le fait que les compétences numériques et en TI sont essentielles pour presque tous les emplois dans le secteur de l’énergie, la demande est également forte pour les professionnels spécialisés dans la conformité réglementaire et dans l’analyse des données.

L’IA dans le secteur de l’énergie : multiplier les possibilités face à la pénurie de talents

L’intégration de l’IA dans le secteur de l’énergie révolutionne la gestion de la main-d’œuvre en automatisant les tâches et en fournissant des solutions de formation sur mesure. Cela renforce la productivité, réduit la pression sur les ressources humaines et crée une demande pour de nouvelles compétences.

L’IA n’est pas seulement un outil d’automatisation. Elle remodèle le profil de la main-d’œuvre en :

  • améliorant les compétences humaines, grâce à l’automatisation des tâches répétitives;
  • fournissant des renseignements précieux, à partir de l’analyse des données, afin de renforcer la prise de décisions;
  • favorisant un environnement de travail plus sûr grâce à des simulations de formation avancées.

Les entreprises du secteur de l’énergie utilisent de plus en plus des plateformes basées sur l’IA pour proposer des formations personnalisées et des simulations en réalité virtuelle. Ces outils permettent aux employés de développer et de perfectionner des compétences essentielles, dans un contexte marqué par une pénurie de professionnels qualifiés. L’IA améliore également les performances des projets d’ingénierie en automatisant les tâches, en optimisant les calendriers et en améliorant l’agilité des équipes.

Plus précisément, l’IA permet de remédier à la pénurie de talents dans plusieurs domaines clés.

  • Stimuler la productivité : l’IA générative améliore la productivité grâce à la maintenance prédictive des systèmes de réseau, au stockage efficace de l’énergie et à la distribution en fonction de la demande.
  • Optimisation des réseaux intelligents : l’IA permet aux réseaux intelligents d’optimiser le flux d’énergie avec une supervision humaine minimale, améliorant ainsi l’efficacité et la fiabilité.
  • Surveillance continue : dans la gestion des installations, la combinaison de l’Internet des objets et de l’IA permet une surveillance continue de la santé structurelle, favorisant la durabilité.
  • Préparation à la cybersécurité : un rapport récent a révélé que 62 % des professionnels du secteur des services publics interrogés manquent de confiance en leurs compétences en matière de cybersécurité. Les outils intégrant l’IA peuvent améliorer la détection des anomalies du réseau et décharger les équipes de cybersécurité très sollicitées.
  • Détection des menaces en temps réel : les systèmes de gestion des événements et de l’information de sécurité alimentés par l’IA analysent le trafic du réseau, à la recherche de modèles suspects, automatisant ainsi l’évaluation des vulnérabilités dans les infrastructures énergétiques.
  • Solutions de formation innovantes : les organisations utilisent des simulations optimisées par l’IA pour la formation pratique et la réalité augmentée pour le guidage à distance lors des opérations sur le terrain.
  • Maintenance prédictive : la maintenance prédictive fondée sur l’IA aide à prévoir les pannes d’équipement, permettant une programmation proactive basée sur les données.
  • Technologies de surveillance à distance : les drones et les systèmes de réalité augmentée alimentés par l’IA facilitent les inspections et les diagnostics à distance, améliorant ainsi l’efficacité opérationnelle.

Bien que l’IA présente certains défis, sa valeur l’emporte largement sur ces obstacles. La nécessité d’une supervision humaine dans la prise de décisions complexes garantit que l’IA est utilisée de manière responsable et empathique pour renforcer son efficacité. Par ailleurs, l’efficacité de l’IA repose sur des données de haute qualité. Cela souligne l’importance des stratégies robustes de gouvernance des données pour en préserver l’exactitude.

Bien qu’il existe des investissements initiaux et des défis d’intégration, en particulier dans les régions confrontées à des pénuries de talents, le potentiel de transformation de l’IA pour stimuler l’innovation et la productivité en font une technologie indispensable pour les organisations résolument engagées dans le progrès.

IA et humanité : un partenariat pour un avenir énergétique durable

Il est essentiel de remédier à la pénurie de talents pour assurer la réussite de la transition énergétique. Dans ce contexte, il est indispensable de mettre en place une stratégie globale comprenant des initiatives de formation de grande ampleur, une collaboration avec les établissements d’enseignement et un soutien aux travailleurs déplacés.

En exploitant l’IA et en investissant dans des programmes de perfectionnement, l’industrie peut non seulement combler les lacunes actuelles, mais aussi se préparer aux demandes futures. Cette approche intégrée garantira une transition durable et équitable vers des sources d’énergie plus propres, ce qui permettra en fin de compte de mener à bien des projets vitaux pour un avenir durable.