CGI s’engage pour un monde inclusif et durable, en plaçant la responsabilité au cœur de son modèle et de ses activités. CGI en France vise à ce titre la neutralité carbone d’ici 2027, et centre ses efforts sur la mise en œuvre de projets visant à augmenter significativement l’inclusion et la diversité au sein de ses équipes.
Clément Bernard, Vice-Président en charge du Centre d’innovation dédié à la transformation digitale, nous détaille sa vision, et les ambitions de CGI pour rendre le numérique réellement accessible à tous.
Commençons par une question simple mais néanmoins essentielle : comment définiriez-vous l'accessibilité numérique ?
L'accessibilité numérique est la mise à disposition de l'information dans sa forme numérique à tous les individus, quels que soient leur matériel ou logiciel, leur langue maternelle, leur culture, leur localisation géographique, ou leurs aptitudes physiques ou mentales. Plus simplement, c’est rendre accessibles tous les contenus (images, textes…) quels que soient leurs modes de consultation.
L’accessibilité numérique semble encore un sujet ignoré par de nombreuses entreprises et administrations…
Je préfère voir le verre à moitié plein ! Le Plan national de relance évoque le sujet de l'accessibilité numérique, en lui octroyant des moyens [250 millions d'euros, et le recrutement de quatre mille conseillers numériques]. Cela témoigne d'une vraie prise de conscience. Je crois que la crise sanitaire nous a permis de réaliser à quel point ces sujets sont clés, tout comme les confinements nous ont fait prendre conscience de la place essentielle du numérique dans nos vies et notre quotidien. Grâce à cette expérience inédite, on mesure mieux, aujourd'hui, combien il est important que tout un chacun puisse accéder facilement à des services administratifs ou médicaux en ligne, à des outils lui permettant de télétravailler, à des sites pédagogiques et éducatifs, etc. Par ailleurs, les bouleversements engendrés par cette crise sanitaire ont aussi eu un effet sur les Français. Nombreux sont ceux qui souhaitent donner du sens à leur travail, œuvrer, à leur échelle, pour "le bien commun". Faire progresser l'accessibilité numérique s'inscrit complètement dans cette démarche.
Avec les impératifs sanitaires et les incertitudes économiques, les entreprises font déjà face à de nombreux chantiers. Comment les convaincre d'intégrer, "en plus", l'accessibilité numérique dans leurs priorités ?
Tout simplement en expliquant qu'il s'agit de deux sujets différents, qui n'ont pas la même temporalité. Les inquiétudes sanitaires et économiques ont des conséquences réelles mais circonscrites dans le temps. Tandis que la "bataille" pour l'inclusion en général et l'accessibilité numérique en particulier s'inscrit dans la durée. J'ajoute "l'inclusion", même s’il s’agit d'une problématique à part. Auparavant, l'exclusion numérique renvoyait avant tout au handicap. Nous savons tous, désormais, que l'inclusion réelle recouvre de nombreuses autres dimensions sociales. Par exemple, pour poursuivre sa scolarité pendant un confinement, il est nécessaire de pouvoir accéder à un ordinateur et à une connexion haut débit, de s'appuyer sur des parents maîtrisant suffisamment la langue et la technologie pour aider… Ces conditions n'étaient pas remplies dans toutes les familles, et trop d’enfants se sont retrouvés dans une situation d’exclusion.
Quels projets/services/technologies une entreprise ou administration peut-elle déployer pour améliorer son accessibilité numérique ?
C'est une question complexe, car il existe énormément de cas différents. Un malvoyant n'a bien sûr pas la même problématique ni les mêmes besoins qu'une personne ne pouvant utiliser ses membres supérieurs. Il s'agit donc d'utiliser un ensemble de technologies diverses, répondant chacune à un besoin précis. La bonne nouvelle, c'est que nombre de ces technologies fonctionnent aujourd'hui de manière fiable. Le speech-to-text et le text-to-speech, par exemple, ont fait d'énormes progrès et offrent désormais des solutions éprouvées, des interactions fluides. Plus généralement, les technologies progressent. Nous sommes en train de passer d'une surcouche logicielle, qui "traduit" un site de, et vers, la personne en situation de handicap, à des interfaces homme-machine, types oreillettes connectées, qui s'affranchissent de l'ordinateur. L'expérience utilisateur se fluidifie, et les progrès dans ce domaine sont très prometteurs.
La loi prévoit une amende de 20 000 euros par an et par service non accessible. Est-ce suffisant pour inciter les organisations à s'engager pleinement dans l'accessibilité numérique ?
L'amende contribue à la prise de conscience. Mais il faut surtout retourner le problème, l'aborder de manière positive. Rendre ses sites et ses services accessibles n'est pas une contrainte mais une opportunité ! Une opportunité sociale, sociétale, et business. De 10 à 20% de la population française est atteinte d'un ou plusieurs handicaps ; il existe donc clairement un marché à capter. Prenons le cap d'une personne en situation de handicap qui souhaite acheter un produit en ligne. Clairement, elle va choisir une plateforme où elle pourra commander facilement, joindre le service client sans problème et selon le moyen qui l'arrange, etc. De même, si vous n'avez pas dans vos pratiques l'habitude de traduire en texte toutes les images de votre site, les non-voyants par exemple ne seront pas avertis de vos campagnes commerciales. Un pop-up "promo spéciale fête des mères" doit être aussi accompagné de texte, pour que tout le monde puisse le comprendre. En fait, c'est tout le site qui doit être pensé en termes d’accessibilité : textes clairs, images "traduites", mais aussi navigation structurée. Les entreprises qui n'ont pas compris cette réalité se privent d'un marché. Dernier argument à ce sujet : rendre son site accessible, c'est aussi faciliter la navigation, donc améliorer l'expérience de tous les utilisateurs. Les technologies améliorent le quotidien, la vie et la productivité de tout le monde. Rappelons-nous par exemple que la télécommande a été inventée spécifiquement pour aider les handicapés moteurs. Aujourd'hui, plus personne n'envisage de changer de chaîne autrement !
Dès lors, comment les organisations peuvent-elles progresser sur la question de l'accessibilité ?
Le point de départ consiste selon moi à se professionnaliser. Assurer l'accessibilité de ses sites et ses services à tous les publics, c'est une fonction d'entreprise comme une autre. Elle mérite donc une direction, un budget, une organisation interne... Se fixer une ambition globale mais vague, type "en 2022 tous nos services seront conformes", ne suffit pas. La clé, c'est l'accompagnement, le suivi. Bien sûr, toutes les entreprises ne sont pas outillées, rencontrent des problèmes de technologies ou de compétences…. Aux grands groupes de montrer l'exemple ! Encore une fois, il faut réfléchir sur le long terme. Et ne pas hésiter à se tourner vers un partenaire à même de vous épauler.
Concrètement, par où commencer pour progresser en matière d’accessibilité numérique ?
Il existe plusieurs possibilités, en fonction de la taille de l'entreprise ou de l'organisation, de ses objectifs, des compétences internes… Nous accompagnons par exemple la Direction générale des étrangers en France (DGEF). Cette administration reçoit des demandeurs d'asile, des publics très variés - 3,5 millions d'utilisateurs en tout. Il s'agit d'un public très demandeur et ayant un réel besoin d'accessibilité numérique. Nous avons donc travaillé avec la DGEF sur toute la stratégie de mise en conformité, mené un audit organisationnel, réfléchi aux solutions techniques, aux services rendus, établi un plan pluriannuel. Tout ne se fait pas en un jour, bien sûr, mais nous visons 100% d’accessibilité et une expérience utilisateur équitable pour tous. C'est cela aussi la force de CGI : notre capacité à offrir un accompagnement global, allant du conseil au déploiement et au soutien opérationnel.
Justement, comment CGI s'engage, concrètement, en faveur de l'accessibilité numérique et de l'inclusion en tant qu’organisation ?
Nous travaillons sur l'inclusion au sens large. Prenons le volet sociétal : nous avons été la première ESN à créer sa propre école du développeur, U'DEV. U'DEV propose à des profils atypiques une formation non seulement gratuite mais rémunérée, avec un parcours de bout en bout, de l’alternance à un CDI. En matière d’intégration du handicap, CGI est une entreprise pionnière. C’est pour aller plus loin dans notre engagement que nous avons par exemple fondé La Handitech avec trois autres partenaires. La Handitech fédère et promeut les acteurs de l’écosystème (start-up, entreprises, écoles, laboratoires, etc.) qui innovent au service des personnes en situation de handicap. Nous concrétisons également notre engagement au service de nos clients. Nous réalisons par exemple des speed-meetings pour aider les entreprises à recruter des alternants en situation de handicap. Nous avons aussi lancé une offre de diagnostic-accompagnement Handi-Ready. L'objectif est d'aider les entreprises à identifier leurs métiers et projets à fort potentiel inclusif, avant d'établir ensemble un plan d'action sur-mesure.
Pourquoi un tel engagement ?
Notre conviction, que je partage à 1000%, est que la diversité est bénéfique à toute entreprise. La richesse des échanges et des collaborations naît de la singularité des profils. C'est vrai au quotidien, dans les discussions à la machine à café, comme lors de la conduite de projets. Certaines intelligences atypiques, comme les personnes qui sont autistes Asperger, se révèlent ainsi très précieuses et apportent des compétences pointues, insoupçonnées. Par ailleurs, travailler au sein d'une entreprise qui s'engage réellement en faveur de l'inclusion est très apprécié par les collaborateurs. Nous ressentons chez CGI une grande satisfaction collective à inclure le plus grand nombre, à être moteur sur le sujet. Cela améliore les dynamiques d'équipe, crée de la fierté, renforce l'attachement et le sentiment d'appartenance… Les regards changent, les esprits s'ouvrent et tout le monde en bénéficie. Je l'ai constaté au sein de mes équipes comme chez les clients que nous accompagnons : une fois la machine de l'inclusion enclenchée, tout le monde y gagne et tout le monde s'investit !