Pour encourager les jeunes issus de quartiers prioritaires à créer leur entreprise et donner à chacun les opportunités et les appuis nécessaires, Kawtar Hazel, consultante chez CGI, a lancé avec ses amis une initiative qui prend de l’ampleur, "Startup Banlieue".
Trois jours de réflexion, d'ateliers, de discussions enflammées, trois jours pour travailler un concept d'entreprise, le peaufiner avec des coachs puis le pitcher au Parc des Princes… Trois jours pour passer d'une idée à un véritable projet. C'est le principe de "Startup Banlieue", hackathon d'un nouveau genre dont la deuxième édition, en octobre dernier, a confirmé le succès.
Le vendredi, une centaine de participants a ainsi écouté les porteurs de projets se présenter, avant de choisir le concept qui leur plaisait. Dix-neuf équipes ont été créées, par affinité, avec des jeunes de formations et profils variés. Ces teams, aidées par des mentors et experts (graphistes, développeurs, chefs d'entreprises, cadres dirigeants, directeurs d'écoles…) avaient jusqu'au dimanche pour peaufiner leur startup : développer un prototype, penser un modèle économique, proposer une vision. Elles pitchaient ensuite leur projet devant un jury composé d'entrepreneurs confirmés et d'investisseurs et sous le regard de personnalités telles que Mounir Mahjoubi, ancien Secrétaire d’Etat au Numérique ou encore de Russell Stopford, Chief Digital Officer du Paris Saint-Germain.
"Pour concrétiser un projet, un déclencheur est souvent nécessaire : un coup de pouce, une rencontre, un échange informel… C’est ce que Startup Banlieue veut susciter, en réunissant des jeunes porteurs de projets et des mentors eux-mêmes entrepreneurs ou bien issus du monde de l’entreprise qui apportent leur savoir-faire, leur expérience, leur réseau", explique Kawtar Hazel, co-fondatrice de Startup Banlieue et consultante chez CGI.
Un week-end dont tout le monde sort gagnant
A la clé, pour les gagnants : intégrer de prestigieux incubateurs tels que Station-F, bénéficier d'un accompagnement juridique et de l'appui de consultants pour développer leur business. Et, pour chacun des participants, l'opportunité unique de tester son idée, construire une équipe, mûrir son projet, être accompagné par des experts et prendre confiance avant de se lancer. "Au-delà des prix, tout le monde repart gagnant. C'est vraiment ça, notre objectif : inspirer, fédérer, soutenir la création d'entreprise et les projets innovants dans les banlieues françaises", souligne Kawtar.
Une belle histoire à l'origine du projet
Si de nombreuses startup commencent dans un garage, selon la mythologie de la Silicon Valley, c'est dans un salon qu'est née Startup Banlieue, lors d'une discussion entre amis, autour d'un regret : "de nombreux jeunes des "quartiers" ont d'excellentes idées, parfois très abouties, mais il leur manque un petit quelque chose : l'accès à un réseau, la communication, les codes et les appuis du monde de l'entreprise".
Pour favoriser l'égalité des chances et donner un coup de pouce à ces jeunes, Kawtar et ses amis se lancent donc dans leur "rêve un peu fou" : créer le premier week-end consacré à l’entrepreneuriat au sein des quartiers populaires.
L’objectif est simple : faire tomber les clichés sur ces quartiers tout en valorisant l’entrepreneuriat comme chemin de réussite sociale et la banlieue comme vivier de talents. Un premier post sur Facebook, "énormément partagé", les convainc de la pertinence du projet. "On s'est rendu compte qu'il y avait d'un côté un vrai besoin, et de réelles bonnes volontés de l'autre. De fil en aiguille, après plusieurs mois de travail, on a réussi à organiser notre premier week-end… au Stade de France !" Ce Hackathon pilote reçoit 400 candidatures d'entrepreneurs, dont 160 projets complets, portés à 44% par des femmes – "on est ravies, mais on n'arrive pas à se l'expliquer, ça se fait naturellement".
Une initiative soutenue par CGI
Le succès est tel que l’équipe se structure en association pour pérenniser son action. Les membres, tous bénévoles, poursuivent sur leur lancée et organisent un deuxième week-end événement en 2018. CGI, convaincue par les valeurs et la vision de Startup Banlieue, s’implique dans cette deuxième édition : coup de pouce financier, mécénat de compétences et mise à disposition de collaborateurs volontaires. "J'ai aussi été aidée par mon entité d’appartenance, mes collègues… C'est un projet qui me tient à cœur, qui fait partie de mes identités, donc ce soutien de CGI me touche d’autant plus : il est important pour moi."
Portée par ces bonnes volontés et son enthousiasme communicatif, Kawtar recrute des sponsors, convainc des experts d’accompagner leurs bénéficiaires, développe les partenariats avec l’écosystème entrepreneurial actuel et lance d'autres initiatives avec ses amis : les « Street Mentoring », des sessions de 10 minutes façon speed dating pour échanger avec un mentor et lui poser des questions sur un projet ; les « Masterclass series », des conférences interactives sur différentes thématiques pour aider les futurs entrepreneurs ; et différents programmes d'accompagnement, pour les jeunes talents comme pour les entreprises qui souhaitent s'engager sur le terrain de la diversité.
Deux sessions prévues en 2019
Le point d'orgue de leurs actions demeure le week-end Startup Banlieue. Pour toucher un nouveau public, la prochaine session se tiendra du 26 au 28 avril prochain à Lyon. Le hackaton reviendra ensuite en Ile-de-France fin 2019. "Comme on travaille tous, ce n'est pas facile de réussir à tout organiser sur notre temps libre. Mais on est plus que récompensé par les belles histoires : des jeunes qui arrivent tout timides, prennent confiance et se révèlent au cours du week-end. Ou ces mentors qui avaient des carrières toutes tracées dans de belles entreprises et ont finalement tout lâché pour se lancer dans l'aventure entrepreneuriale !"
Des dizaines de belles rencontres et d'aventures à raconter, d'autres projets à écrire, des jeunes pousses à lancer… Désormais, l'histoire des start-ups s'écrit aussi en banlieue.